Ados et jeux en ligne : détecter les signes d’addiction
Interview : Yannick Claude
Educateur spécialisé au sein de la Maison des Adolescents du Haut-Rhin
Qu’est-ce qui différencie un jeu vidéo d’un jeu en ligne ?
Un jeu vidéo, sur ordinateur ou console essentiellement, est un jeu ne nécessitant pas de connexion internet et auquel on peut jouer seul. Le jeu en ligne, qui nécessite une connexion internet, propose de se retrouver sur une plateforme sur laquelle sont déjà présents d’autres joueurs. Tous peuvent parler entre eux (texte ou voix), jouer les uns contre les autres, s’allier, élaborer des stratégies, etc., dans des domaines variés comme le sport, le combat, la gestion (d’une ville, d’un club de foot…). Spécificité des jeux en ligne : ils sont souvent accessibles avec un simple smartphone.
Quels sont les principaux risques pour nos adolescents ?
Les jeux en ligne sont souvent gratuits, mais proposent en permanence des achats intégrés (pour des vies supplémentaires, des accessoires ou costumes pour le personnage, pour progresser plus vite, etc.). Outre le risque de dérive financière, cela induit que les éditeurs des jeux parviennent à conserver les joueurs pour des parties très longues : plus on reste, plus il y a de chance de dépenser de l’argent. Bien sûr, plus de temps derrière l’écran peut aussi amener à un isolement, à rompre avec son entourage.
Smartphone, tablette, ordinateur dans la chambre… C’est difficile de contrôler ce qu’ils font. Comment y parvenir ?
La meilleure chose à faire pour les parents est de se poser les bonnes questions : qu’est-ce que je leur mets entre les mains, à quel âge, pour quel type d’usage ? Il faut absolument suivre les recommandations d’âge minimum pour les jeux vidéo. Et s’intéresser au jeu en lui-même: comment mon enfant y joue-t-il ? Pourquoi ? Comment réagit-il face au jeu ? Des questions qui peuvent permettre d’anticiper, voire d’éviter des tensions.
L’important, c’est donc de maintenir le dialogue !
Complètement ! Tout en comprenant bien que les jeux sont si réalistes, si proches d’un film, que les ados, en immersion, ont le sentiment d’y être des acteurs. Il faut donc parvenir à mettre en place des règles et des sanctions, sans tomber dans la surenchère. Par-dessus tout, ce qui est important, c’est aussi, pour les parents, d’échanger et de leur faire partager ce qu’ils aiment pour leur offrir d’autres distractions, leur donner à vivre autre chose que leur écran !
Quels conseils donneriez-vous à un adolescent «Addict» aux jeux en ligne ?
Ce qui est essentiel, c’est qu’il accepte de s’entourer, de faire un pas vers ceux qui vivent au quotidien avec lui. Il doit aussi accepter le fait qu’il s’est fait piéger par un jeu qui dévore son temps. Il doit savoir le dire et lancer cet appel au secours.
Un dernier mot sur la compétition de «e-sport» prévue en janvier au Parc Expo de Colmar…
Les compétitions de jeux vidéo sont une discipline qui prend de plus en plus d’ampleur. Pratiquées par de vrais professionnels qui développent de véritables stratégies de jeu, elles déclenchent un engouement que je comprends car cela peut être assez spectaculaire et sympa à regarder.
L’addiction au jeu touche tous les milieux sociaux
Yannick Claude ne fait pas réellement de distinction de milieux sociaux parmi les jeunes et les parents qui viennent le voir pour des questions d’addiction aux écrans. Ce problème touche toutes les familles. En revanche, il reçoit en général plus de garçons que de filles. Observateur, il remarque également que, dans la salle d’attente, les parents sont eux-mêmes souvent plongés dans leur smartphone ou leur ordinateur… Jeux? Travail ? Réseaux sociaux ? Un peu de tout cela probablement, mais ne dit-on pas que l’exemple doit venir des parents ?